16 June 2025 02:07

la Roumanie aux urnes pour un duel présidentiel serré

Garder le cap européen et continuer de soutenir l’Ukraine ou se tourner vers l’extrême droite: la Roumanie élit ce dimanche 18 mai son président, une bataille qui s’annonce serrée, cinq mois après la spectaculaire annulation d’un scrutin entaché de soupçons d’ingérence russe.

Les bureaux de vote ont ouvert à 7 heures (heure locale) ce matin pour le second tour d’une présidentielle qui s’annonce serré. Arrivé largement en tête du premier tour le 4 mai, le chef du parti nationaliste AUR, George Simion, 38 ans, affronte le maire pro-européen de Bucarest, Nicusor Dan, 55 ans, pour décrocher le poste suprême, doté du pouvoir de nommer à des postes clés et de participer aux sommets de l’UE et de l’Otan.

L’élection est surveillée de près par la communauté internationale, Bruxelles s’inquiétant de voir les rangs des dirigeants d’extrême droite s’étoffer et Washington, très critique du fiasco du scrutin de l’automne dernier, appelant à respecter la voix du peuple.

Membre loyal de l’UE, la Roumanie, une nation de 19 millions d’habitants voisine de l’Ukraine, est devenue un pilier essentiel de l’Otan depuis le début de l’offensive russe en 2022. “Nous ne pouvons pas nous permettre de nous écarter de la voie européenne”, commente à Bucarest Luminita Toader, une retraitée de 82 ans, qui craint que son pays ne “se tourne vers l’Est”.

Une mobilisation clé dans le résultat du scrutin

Ancien hooligan ayant cherché à lisser son discours ces derniers mois, George Simion se dit persuadé qu’il sera “le prochain président de Roumanie”. Sauf en cas de “fraudes massives”, a-t-il averti, ouvrant la voie à une contestation en cas de défaite. Ce détracteur des “politiques absurdes de l’UE” pourrait cependant pâtir d’une série de “faux pas” dans l’entre-deux-tours, entre “agressivité” et absence à de nombreux débats, selon les analystes.

Son adversaire, un mathématicien de formation, espère quant à lui un sursaut des abstentionnistes, après un premier tour marqué par un taux de participation de seulement 53%. Dans la diaspora qui a commencé à voter vendredi, les chiffres montrent une forte mobilisation.

“J’invite les Roumains à aller voter car, de chacun d’entre nous, dépend la trajectoire de la Roumanie”, a déclaré à la veille du scrutin Nicusor Dan, un Européen convaincu et fervent soutien de Kiev.

Tandis que George Simion veut mettre un terme à l’aide à l’Ukraine: il exige “une compensation financière” pour l’assistance fournie jusqu’ici et prône “la neutralité, pas l’escalade par l’envoi d’armes”, tout en se défendant d’être “l’ami de Vladimir Poutine”.

Rendre sa “dignité” à la Roumanie: son slogan séduit de nombreux électeurs las d’être considérés comme des citoyens de seconde zone dans l’UE. Très présent sur les réseaux sociaux, même s’il a fermé ses principaux comptes samedi pour “une journée de silence”, il a capitalisé sur leur frustration face aux “politiciens voleurs” au pouvoir depuis 1989 et leur colère devant les difficultés économiques d’un des pays les plus pauvres de l’UE.

La Roumanie, en proie à la “haine” et aux “divisions”

Un climat explosif qui avait déjà porté à la première place le 24 novembre l’extrême droite: un quasi-inconnu, Calin Georgescu, avait créé la surprise après une campagne massive sur TikTok dont le mode opératoire pointait vers la Russie. Cet ex-haut fonctionnaire a depuis été inculpé et exclu de cette nouvelle course, une décision qui a provoqué des manifestations parfois violentes.

Malgré ces revers, il aspire au poste de Premier ministre que George Simion lui a promis s’il est élu, à condition toutefois de parvenir à trouver une majorité suffisante au Parlement.

Le vainqueur aura la dure tâche de réconcilier une Roumanie extrêmement polarisée. “Comment avons-nous fini par être animés par tant de haine et de divisions?”, a lancé le maire de Bucarest à ses partisans pendant la campagne, appelant à “rebâtir l’espoir”.

Alors qu’il est attaqué sur son naturel réservé, “ce trait de personnalité pourrait paradoxalement être un atout pour lui. Dans une période très agitée, un peu de calme fait la différence, surtout face à un concurrent aussi virulent”, estime le politologue Sorin Cucerai.

Article original publié sur BFMTV.com

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