En Israël, Netanyahu désigne un nouveau chef du renseignement et provoque une fois de plus la justice

INTERNATIONAL – « Le processus de nomination est vicié », a fustigé la procureure générale. Le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, a défié ouvertement la justice et une bonne partie de la société israélienne en annonçant jeudi 22 mai au soir la nomination d’un nouveau chef de l’Agence de la sécurité intérieure, le Shin Bet.
Accusé par ses détracteurs de dérive dictatoriale et de conflit d’intérêts dans une affaire qui agite Israël depuis trois mois, Benjamin Netanyahu a décidé de faire fi de l’interdiction que lui avait intimée la veille la procureure générale, en annonçant avoir choisi le général de division David Zini pour succéder au directeur démissionnaire du Shin Bet, Ronen Bar.
Le Mouvement pour un gouvernement de qualité, ONG luttant pour la transparence, a immédiatement annoncé son intention de contester cette nomination devant la Cour suprême.
Pots-de-vin du Qatar
Le Mouvement avait été à la pointe de la lutte contre la réforme de la justice portée par le gouvernement, l’un des plus à droite de l’histoire d’Israël, projet qui avait profondément fracturé le pays en 2023 avant que l’exécutif y renonce, temporairement, dans les premiers jours de la guerre déclenchée le 7 octobre.
D’autres recours sont attendus et le chef de l’opposition, le centriste Yaïr Lapid a appelé le général Zini à « annoncer qu’il ne peut pas accepter cette nomination tant que la Cour suprême ne s’est pas prononcée » sur la légalité de cette décision.
La procureure générale Gali Baharav-Miara, également conseillère juridique du gouvernement, a rapidement dégainé contre l’annonce du Premier ministre. « Il existe un sérieux soupçon (que Benjamin Netanyahu) ait agi en situation de conflit d’intérêts », a-t-elle déclaré.
En cause, une enquête du Shin Bet diligentée par son chef sortant et visant des proches de Benjamin Netanyahu soupçonnés d’avoir touché des pots-de-vin du Qatar.
Animosité personnelle
Les avis juridiques défavorables émis par Gali Baharav-Miara à l’encontre de plusieurs projets du gouvernement insupportent l’exécutif au point que le cabinet a entamé contre elle une procédure de destitution.
Mercredi soir, la Cour suprême a statué sur le renvoi de Ronen Bar en jugeant que la décision prise le 21 mars par le gouvernement de le limoger était « contraire à la loi ».
Officiellement, le gouvernement israélien reproche à Ronen Bar son incapacité à empêcher l’attaque sanglante du Hamas ayant déclenché la guerre à Gaza. Ronen Bar, qui a reconnu sa responsabilité personnelle dans cet échec, a toujours soutenu que la décision de Netanyahu de le limoger était motivée par une animosité personnelle à son endroit et non pour des raisons liées à ses compétences professionnelles.
Ce limogeage avait ravivé les divisions de la société israélienne, au moment où le gouvernement décidait de repartir à l’offensive contre le Hamas après deux mois de trêve, provoquant d’importantes manifestations contre l’exécutif.
Auteur d’un rapport sur les failles de l’armée en cas « d’incursion surprise »
Selon le bureau du Premier ministre, « le général Zini a occupé de nombreux postes opérationnels et de commandement dans les Forces de défense israéliennes », notamment comme combattant de l’unité d’élite Sayeret Matkal, ou encore de fondateur de la brigade commando, un corps créé en 2015 pour regrouper des unités d’élite.
Fils d’émigrés venus de France et petit-fils d’une survivante du camp d’extermination nazi d’Auschwitz, le général Zini est actuellement chef du commandement de la formation au sein de l’armée israélienne et à la tête du corps d’état-major général.
Le gouvernement le crédite d’avoir rédigé en mars 2023, six mois avant l’attaque du Hamas, un rapport exposant les failles de l’armée israélienne en cas « d’incursion surprise » en Israël à partir de la bande de Gaza.
« Le chef du Shin Bet est nommé par le gouvernement sur proposition du Premier ministre, c’est la loi et tout le monde doit respecter la loi, y compris la Cour et la conseillère juridique du gouvernement », avait déclaré Benjamin Netanyahu mercredi soir, indiquant déjà son intention de passer outre la justice.
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